Chenil, un droit, des devoirs

Si pour la plupart d’entre nous, la chasse rime de façon incontournable avec l’utilisation d’auxiliaires canins, la détention d’un ou plusieurs chiens est régie par un certain nombre de règles clairement définies. Or, nul n’est censé ignorer la loi…

Parmi l’arsenal juridique mis en place tant au niveau français, qu’à l’échelle européenne, le premier principe à retenir est sans nul doute celui de la protection et du bien-être animal. D’une manière générale, l’article L214-1 du Code Rural stipule que « tout animal étant un être sensible, il doit être placé par son propriétaire dans des conditions compatibles avec les impératifs biologiques de son espèce ». Ce postulat figure également dans l’arrêté du 25 octobre 1982 (modifiés par les arrêtés du 17 juin 1996 et du 30 mars 2000) qui définit de façon très précise la réglementation relative à la garde, la détention et l’élevage des animaux domestiques et de compagnie. Le législateur entend par animal de compagnie tout animal détenu par l’homme pour son agrément. Cette catégorie concerne donc tout particulièrement nos auxiliaires cynégétiques. Ainsi, tout détenteur de chien de chasse s’engage à n’exercer aucun mauvais traitement envers son compagnon, et accepte tacitement d’être responsable de son état de santé. Cela passe avant toute chose par une nourriture adaptée, équilibrée et suffisamment abondante pour satisfaire aux besoins physiologiques de l’espèce, mais aussi par une réserve d’eau fraîche régulièrement renouvelée, et servie dans un récipient maintenu propre et à l’abri du gel. L’article 4a de l’annexe I de l’arrêté du 25 octobre 1982, précise par ailleurs qu’ « il est interdit d’enfermer des animaux de compagnie et assimilés dans des conditions incompatibles avec leurs nécessités physiologiques ». Quel que soit le nombre de chiens dont vous disposez, le chenil devra donc être approprié et conforme à certaines exigences. Du point de vue des dimensions, chaque sujet devra pouvoir au minimum disposer d’une surface de 5 m2, la clôture ne devant pas être inférieure à 2 mètres de haut. Afin de protéger les chiens d’éventuels coups de chaud, cet enclos comportera obligatoirement une zone ombragée. Le propriétaire veillera à maintenir l’enceinte dans un irréprochable état de propreté. Afin d’en faciliter le nettoyage, un sol en dur s’impose, et, s’il est imperméable, il devra être muni d’une pente favorable à l’écoulement des liquides. Concernant les excréments ceux-ci seront impérativement évacués de manière quotidienne. Ces locaux feront enfin l’objet d’une désinfection et d’une désinsectisation à intervalles réguliers. Pour protéger vos compagnons des intempéries, l’enclos devra disposer d’abris parfaitement étanches. Fabriquée en bois ou tout autre matériau isolant, la niche aura des pieds conséquents évitant tout contact direct avec le sol, et sera garnie d’une litière en hiver. Elle devra par ailleurs être orientée au sud. A l’instar du chenil, une attention toute particulière sera apportée à son nettoyage et à son aseptisation. Enfin, devant la niche, il faudra prévoir soit une surface minimale de 2 m2 en dur, soit un caillebotis afin d’éviter que le chien dehors ne piétine constamment dans la boue. Dans le cas d’un caillebotis, celui-ci sera étudié de façon à ce qu’il ne puisse occasionner aucune blessure, notamment à l’extrémité des pattes.
Avant de débuter toute implantation de chenil, renseignez-vous sur les normes en vigueur. Pour cela référez-vous au règlement sanitaire départemental, et n’hésitez pas à contacter la Direction Départementale de la Protection des Populations. Sachez avant tout que les règles diffèrent selon le nombre de chiens que vous souhaitez accueillir. Si vous possédez de un à neuf chiens adultes (sevrés), et que vous ne réalisez pas plus d’une portée par an destinée à la vente, votre chenil ne sera soumis à aucune déclaration particulière. Le respect des règles élémentaires énoncées précédemment suffira d’ordinaire à vous éviter tout tracas Néanmoins, si vous devez hébergez de 10 à 49 individus, et/ou si vous vendez plus d’une portée par an, vous entrez dans le domaine des installations dites classées, et devez donc obligatoirement déclarer votre projet. L’article 10 du décret n°91-823 du 28 août 1991, prévoit en effet que tout éleveur ou propriétaire de plus de 9 chiens sevrés doit transmettre en préfecture une « Déclaration d’établissement hébergeant des chiens» (Cerfa n° 504509). Parallèlement, une seconde déclaration doit être déposée auprès de la D.D.P.P. Mise en garde, et non des moindres, le défaut de cette démarche peut être sanctionné, selon l’article L215-10 du Code Rural, d’une amende de 50.000 euros. Outre ces formulaires, le dossier doit être accompagné des plans de masse, d’un descriptif des aménagements assurant salubrité et hygiène, ainsi que des documents explicites relatifs à l’approvisionnement en électricité, eau potable et ventilation. Concernant le lieu d’implantation d’un tel chenil, il est soumis à plusieurs impératifs. Le règlement sanitaire départemental fixe les distances d’éloignement minimal pour ce type de construction. Il est ainsi commun d’admettre les chiffres suivants : 100 mètres des habitations de tiers, des stades et campings ainsi que des zones destinées à l’habitation ; 35 mètres des puits, forages, sources et installations souterraines ou semi-enterrées utilisées pour stocker des eaux ; 200 mètres des plages et autres lieux de baignade ; et 500 mètres en amont de toute activité piscicole et conchylicole. Comme pour la plupart des aménagements, vous êtes dans l’obligation de faire soit une déclaration de travaux, soit une demande de permis de construire (lire encadré). Pour ce qui est des règles relatives aux bâtiments et installations, outre celles déjà évoquées et liées au bien-être animal, nous retiendrons que les locaux devront être ventilés de manière permanente, en évitant toutefois les courants d’air. Ce renouvellement d’air sera proportionnel à la taille des chiens, à savoir de 2m3/heure pour les sujets de plus petite taille jusqu’à 10m3/heure pour les plus grands. Les équipements électriques seront quant à eux conformes aux normes en vigueur. Les sols ainsi que les bas des murs (sur une hauteur minimum de un mètre) devront être imperméables et maintenus en parfait état d’étanchéité. Le propriétaire s’engagera aussi à mettre en œuvre les moyens pour lutter efficacement contre l’invasion de rongeurs et d’insectes. En ce qui concerne le traitement des eaux usées, l’installation devra disposer d’un système d’assainissement performant. Dissocié du réseau de l’habitation principale, il sera aussi obligatoirement séparé de celui des eaux pluviales. Sa capacité sera en rapport avec la quantité d’effluents collectés, afin d’éviter tout débordement dans le milieu naturel. Si le raccordement au réseau collectif est possible, sachez qu’il nécessitera toutefois la demande d’une autorisation auprès de la municipalité. Enfin, reste le problème crucial du traitement des déjections canines. Il est en effet théoriquement interdit de s’en débarrasser via la collecte d’ordures ménagères ou encore le tout-à-l’égout. Les structures importantes auront la possibilité d’installer soit une fosse septique indépendante, en vue d’un épandage ultérieur, soit un système de lagune. Sachez qu’en cas d’épandage sur des terres agricoles, la cuve devra pouvoir recevoir les déjections produites au cours d’une période minimum de quatre mois. Pour les propriétaires ne possédant que quelques chiens, la solution la plus économique restera sans doute le compostage des excréments. L’inconvénient d’une telle méthode résidant dans les odeurs nauséabondes qu’elle dégage.
Si l’installation d’un chenil impose certaines règles en termes de bien-être animal, d’hygiène et de santé publique, elle doit aussi tenir compte des éventuelles nuisances à autrui, en particulier les troubles sonores liés à d’inévitables aboiements. Le législateur a dans ce cas précis prévu certaines normes auxquelles il convient de se plier. Un aménagement judicieux s’avère donc essentiel. On évitera ainsi de construire un chenil ayant un vis-à-vis sur la voie publique. Une solution peut consister à planter des haies qui feront à la fois office d’écran visuel et sonore. Par ailleurs, dans la mesure du possible, la nuit, on rentrera les chiens à l’intérieur des bâtiments. Afin d’éviter tout jappement d’impatience, on ne saurait trop conseiller de distribuer la nourriture à heure fixe. Enfin, sachez que si une bonne éducation reste le meilleur moyen de limiter les aboiements, il existe toutefois sur le marché des colliers permettant de calmer les sujets les plus récalcitrants.

50 et plus
Certains équipages ou vautraits disposent parfois de meutes conséquentes comptant plus de 50 individus. Si les règles de protection animale,de santé publique et de nuisances restent les mêmes, sachez que de telles installations ne sont pas soumises à simple déclaration, mais à autorisation. Le projet devra passer devant le Conseil Départemental des Risques Sanitaires et Techniques, après avis de la Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement. Ceci implique la réalisation d’une étude d’impact sur l’environnement, d’une étude de danger ainsi que d’une enquête publique dans un rayon d’un kilomètre autour du lieu d’implantation.

Déclaration de travaux ou permis de construire
Les travaux qui créent entre 5 m² ou 20 m² de surface de plancher ou d’emprise au sol sont soumis à déclaration. Le seuil de 20 m² est porté à 40 m² si la construction est située dans une zone urbaine d’une commune couverte par un plan local d’urbanisme (PLU) ou un document assimilé (par exemple, un plan d’occupation des sols). Toutefois, entre 20 et 40 m² de surface de plancher ou d’emprise au sol, un permis de construire est exigé si, après réalisation, la surface ou l’emprise totale de la construction dépasse 170 m². Au-delà de 40 m2, l’obtention d’un permis de construire est inévitable.

Silence on dort !
D’une manière général on considère un bruit gênant dès lors qu’il dépasse de plus de 5dB le jour (7h/22h) et de 3dB la nuit, le niveau du bruit ambiant. En dessous de 10 chiens, les bruits émis par les animaux seront considérés comme domestiques et sanctionnés comme tels. Pour les installations dites classées, les valeurs en limite de propriété ne peuvent excéder 70 dB(A) pour la période de jour et 60 db(A) pour la période de nuit, sauf si le bruit résiduel pour la période considérée est supérieur à cette limite.

Christophe AUBIN