Dis Médor, pourquoi tu tousses ? La toux de chenil

La trachéobronchite infectieuse canine, plus connue sous le nom de toux de chenil, est l’une des pathologies du chien les plus répandues, et touche chaque année un nombre conséquent de sujets. Le point sur cette maladie infectieuse particulièrement contagieuse.

Comme son nom l’indique la trachéobronchite infectieuse canine (TBIC) affecte l’appareil respiratoire du chien. Elle se transmet d’un spécimen à l’autre par simple contact ou bien de façon indirecte. La contagion se faisant principalement par l’inhalation d’air contaminé par des animaux déjà malades. Les agents infectieux, virus et bactéries, se propagent ainsi d’un chien à l’autre grâce aux particules expulsées lors de quintes de toux et d’éternuements, par l’écoulement nasal ou encore par le contact nez-à-nez. Tout chien susceptible de croiser l’un de ses congénères est donc potentiellement exposé. Les parties de chasse, les pensions et chenils, les concours, les expositions canines, les cours d’éducation ou tout simplement la rue, sont autant de lieux où votre compagnon court par conséquent un risque certain. Car très contagieuse, la maladie « saute » d’un sujet à l’autre à une vitesse impressionnante. Dans les locaux à fortes de densité de chiens, tels les élevages ou les chenils, l’épidémie prend souvent des proportions importantes. Toutefois, le terme vulgarisé de toux de chenil est quelque peu impropre, puisqu’en dehors de ces communautés, la maladie peut tout aussi bien affecter un chien partiellement isolé, qui pourra, à titre d’exemple, être infecté au cours d’une simple promenade.
La TBIC est une affection plurifactorielle, dans la mesure où elle résulte le plus souvent de l’association de plusieurs agents pathogènes. Parmi ceux-ci, deux jouent un rôle prépondérant dans le développement de la maladie. Le premier est la bactérie Bordetella bronchispetica (Bb). Ce bacille, appartient à la même famille que Bordetella pertussis, responsable de la coqueluche chez l’être humain. Il pénètre la gorge et le nez avant de se fixer au fils des muqueuses, puis secrète un enzyme qui va neutraliser les cellules sensées préserver l’appareil respiratoire. Les premiers symptômes apparaissent d’ordinaire dans les 3 à 4 jours suivant la contamination, et perdurent en moyenne d’une à deux semaines. Néanmoins, la bactérie peut rester présente de 2 à 3 mois dans les voies respiratoires. Certains chiens peuvent donc apparaître comme étant redevenus sains, mais exécrer des particules susceptibles de contaminer leurs congénères. Le second agent, le plus souvent associé à la TBIC, est le virus Parainfluenza canin (CPi). Virus voisin de la grippe s’il on veut une nouvelle analogie aux maladies touchant l’Homme. Chez le chien, il se développe au niveau de la muqueuse du nez, de la trachée et des bronches. Le sujet devient très rapidement excréteur et hyper-contagieux. Le CPi peut à lui seul être responsable de la TBIC, mais la maladie sera d’autant plus grave s’il est associé à Bordetella bronchispetica. Si comme déjà évoqué cette bactérie et ce virus ne sont pas sans rappeler respectivement la coqueluche et la grippe, la toux de chenil n’est toutefois pas une zoonose. Il n’y a par conséquent aucun risque de transmission du chien vers l’Homme. Pour conclure sur les agents pathogènes, notons que les adénovirus CAV-1 (responsable de l’hépatite de Rubarth) et CAV-2 (à l’origine de laryngotrachéïte infectieuse canine) peuvent aussi intervenir dans la TBIC. Enfin, force est de constater que certains spécimens sont plus enclins que d’autres à la maladie. Le stress, le manque d’hygiène, l’âge (jeunes ou vieux sujets) ou un état immunodépresseur (parasites, autres maladies, prescriptions médicales…) sont autant de facteurs favorisant le développement de la toux de chenil.
Le symptôme le plus caractéristique de la TBIC est évidemment la toux. Sèches et persistantes, les quintes sont épuisantes pour l’animal, et peuvent parfois provoquer des vomissements. Le plus souvent, on observe simultanément de faibles écoulements clairs au niveau du nez, voire des yeux. D’ordinaire, l’état général du sujet atteint n’est pas particulièrement modifié, et celui-ci ne présente aucune fièvre. On parle alors de forme bénigne ou simple de la TBIC, dont la guérison intervient dans un délai deux à trois semaines, parfois même sans traitement particulier. Toutefois, cette maladie peut revêtir une forme dite compliquée, présente d’emblée, ou résultante des dégradations d’une forme simple. Celle-ci se caractérise par une atteinte de l’appareil respiratoire profond pouvant évoluer vers une bronchopneumonie. Dans ce cas on observe une hyperthermie, accompagnée d’une détérioration de l’état général du spécimen infecté : léthargie, perte d’appétit, etc… La toux est humide, productive et l’écoulement nasal se fait plus épais, quand il n’est pas verdâtre et purulent. Sans traitement adéquat, la maladie peut conduire à la mort de l’animal en seulement quelques semaines. Ce sont les jeunes sujets, non vaccinés, et hébergés dans des conditions insalubres qui sont le plus souvent atteints de cette forme compliquée de la toux de chenil.
Dans la plupart des cas, un simple constat des signes cliniques suffit au praticien pour diagnostiquer la TBIC. Toutefois, le vétérinaire pourra effectuer soit un prélèvement des sécrétions à l’aide d’un écouvillon, soit une un prise de sang, afin de déterminer de façon exacte l’agent responsable, et pouvoir ainsi adapter le traitement. Dans le cas d’une forme simple de la maladie, la toux sèche doit être combattue à l’aide d’un sirop antitussif, ne serait-ce que parce qu’elle est irritante et épuisante pour le chien. Et même, si dans ce contexte, l’antibiothérapie n’est pas impérative, elle reste néanmoins fortement conseillée. A contrario, dès lors que la TBIC présente un caractère sévère, il est absolument nécessaire de recourir à une molécule bactéricide, le plus souvent accompagnée d’un anti-inflammatoire. La toux humide et productive est quant à elle facilitée par l’administration de substances mucolytiques. La durée du traitement peut varier entre une et trois semaines selon la gravité. En cas de diagnostic avéré, le spécimen infecté doit être isolé pour éviter la contamination des autres chiens. On ne répètera jamais assez combien cette pathologie est hautement contagieuse… Les parties de chasse sont de toute façon à proscrire, comme tout effort d’ailleurs, l’entrée rapide de l’air dans les bronches ayant un effet irritant qui ne fait qu’aggraver la toux.
Coté prévention, il existe des vaccins spécifiques contre la toux de chenil contenant la valence Bb, en association ou non à la valence Pi. La valence Parainfluenza est le plus souvent associée aux vaccins de type CHP (maladie de Carré, hépatite, parvovirose), mais ne suffit pas à elle seule à prémunir le chien contre une forme grave de TBIC. Pour prévenir à la fois contre la bactérie et le virus, deux sortes de vaccins sont disponibles sur le marché : les vaccins inactivés administrables par injection (2 piqures à 2 semaines d’intervalle, puis un rappel annuel) et les vaccins dits vivants atténués dont l’instillation se fait par voie intranasale (un seul aérosol par an). Ces derniers ont la réputation d’offrir une protection plus rapide, car ils créent une barrière sur la porte même d’entrée de la bactérie. Si ces vaccins ont une efficacité prouvée, il faut toutefois souligner l’importance des conditions d’hygiène.. Panier, caisse de transport ou chenil doivent être d’une propreté exemplaire et traités régulièrement à l’aide d’un produit bactéricide. De la même façon, il est également essentiel d’assurer une bonne ventilation des locaux d’hébergement (box, chenil…), la diffusion de la TBIC étant largement favorisée par les excès d’humidité.

Christophe AUBIN